Suite au festival FAUNE SONORE, ou le groupe NozaJazz & P-One a eu l’occasion de faire leur première scène, on en a profité pour faire une interview à chaud juste après leur prestation.
DavyCroket : Salut les gars, alors cette première scène, votre ressentit ?
Nosa : Eh bien, première date ensemble, on avait pas mal d’appréhension par rapport à cette scène et finalement on est vraiment satisfait du résultat, même si les conditions n’ont pas été avec nous (2 coupures de son…). Apparemment, on a bien sauvé le truc donc à nos yeux, c’est un succès.
P-One : Super show, les erreurs survenues ont été indépendantes de notre volonté, on a du improviser à notre façon, on a vu un public réceptif qui a su nous aider. On a donné et on a reçu donc c’est parfait !
DavyCroket : Pour ceux qui ne vous connaissent pas encore, qui est qui, qui fait quoi et comment ça a commencé ?
P-One : Alors moi c’est Pablo aka P-One, beatmaker qui a débuté en tant que batteur. Ca va faire 1 an et demi que j’ai commencé à travailler sur du sample, sur des compositions en général, puis au lycée j’ai rencontré Nosa’, on a commencé à discuter, parler de bosser mais sans trop s’engager vu qu’on gérait nos études à côté. C’est vraiment à partir de l’été dernier qu’on a commencé à travailler ensemble, à se fixer des objectifs…
Nosa : Nosajazz, second membre, du binôme, anciennement connu sous le nom de Khalid. Ca fait environ 8/9 ans que j’écris et peu de temps que je travaille avec Pablo, comme il vient de le dire. Il y a eu une grosse entente dès le début, c’est pourquoi j’ai préféré délaisser la vie d’artiste en solo pour la mener aux côtés de mon fidèle compère ici présent.
DavyCroket : Comment se passe la vie à deux (les productions, les textes etc..) ?
(Rires)
P-One : Et bien, en fait, le but du jeu c’est d’aller le plus vite possible, car on essaie de faire parler l’instinct au maximum, c’est notre idée. On se retrouve chez moi pour dénicher un sample ensemble, on tente deux trois accords et on cherche tout de suite un thème/une idée pour que Nosa’ puisse écrire. Pendant ce temps-là, je peaufine la prod. Ensuite, on se retrouve tous les deux.
Nosa : Il faut savoir qu’on est passés chacun d’une carrière solo à un travail en groupe, donc on a du remanier nos habitudes pour pouvoir travailler avec efficacité, en duo.
Pablo : On ne cherche pas à balancer une instru’ et kicker dans la seconde qui suit ; on tient vraiment à ce qu’il y ait une cohésion entre le texte, le flow et la prod’.
Nosa : Concrètement, on est à la recherche de MUSIQUE et j’insiste sur le mot. L’idée, c’est qu’on essaye de délaisser ce côté répétitif dans le rap qui consiste à faire couplet/refrain/couplet/refrain… On a voulu déstructurer nos morceaux.
Pablo : Quand on travaille ensemble, c’est avant tout pour se détendre et mettre tous nos problèmes de côté… On se met le moins d’œillère possible.
Davycroket : Une question pour toi Nosa, je voulais en savoir plus sur la connexion pour le morceau avec Deen Burbigo et alpha Wann ?
Nosa : Sans trop aller dans le détail, une amie a fait écouter mes morceaux à son père qui a pas mal de contacts sur Paris dont Alpha, et c’est ce dernier qui est venu me contacter sur Facebook. On a commencé à parler featuring et je suis monté quelques semaines après. J’en garde un excellent souvenir !
DavyCroket : Quels sont vos futurs projets ?
P-One : On a un EP qui se concrétise de plus en plus, EP qui sortira prochainement sous le nom d' »Exordium ». On compte le placer en prix libre sur Bandcamp et si possible en faire un format physique. Il y aura quelques featuring dont on taira les noms pour l’instant. On s’est vraiment déchiré le cul depuis un an, et maintenant qu’on a remis en question cette démarche artistique (celle de travailler à deux), on pense honnêtement avancer sur les projets et le son en général.
Nosa : A côté de ces projets, on tient à se produire davantage sur scène. A mon sens, il n’y a pas meilleur que la scène pour pouvoir exprimer toutes les émotions qu’on éprouve. Jusqu’à maintenant, on a été habitué aux sessions en studio et sincèrement c’est un réel plaisir de pouvoir se produire devant un public.
DavyCroket : Qu’est-ce que vous pouvez dire à ce qui dise que le « Rap c’était mieux avant » ?
P-One : Cette phrase, c’est surtout une phrase pour se mettre des œillères, c’est une manière de s’arrêter et de se dire « Ouais ok, moi j’ai fait mon petit chemin, j’ai écouté 2/3 artistes qui me plaisaient pas, je vais m’arrêter là ». Mais bon, dans le rap, il se passe plein de choses, et dans le monde entier. Le rap français c’est une chose, le rap c’en est une autre. C’est absurde de se dire que c’était mieux avant, il y aura toujours des mecs qui gratteront et produiront jusqu’à s’en faire mal au poignet.
Le rap c’est avant tout une musique vivante avec des textes et des idées.
Le rap est une culture, tout le monde croyait qu’elle allait s’arrêter, mais elle est toujours vivante. Justement en ce moment on pense que le hip-hop est en train de ressortir des placards, beaucoup de gens pensent que le rap sonne avec gros bling bling mais c’est totalement faux, le rap c’est avant tout une musique vivante avec des textes et des idées.
NosaJazz : Pour moi, il y a un véritable problème dans la mentalité des gens ; rester bloqué sur ce qui a été fait auparavant et ne pas s’ouvrir à ce qui se fait aujourd’hui c’est dommage car la musique a évolué, et elle est intemporel ; elle traverse les époques et se transforme en parallèle, c’est ça qui est intéressant. Il faut arrêter d’être aussi fermé d’esprit ; il y a réellement quelque chose à prendre aujourd’hui !
P-one : L’important avant tout c’est d’être curieux !
DavyCroket : Le fait d’utiliser le scratch sur scène, qui est une des discipline du hip-hop, comment ça s’est intégré au live ?
P-One : Eh bien en fait, avant de faire des prods j’ai commencé par scratcher, vu que j’étais batteur à la base, ça me plaisait vraiment de jouer avec les percussions. A la base, je mettais des beats et je scratchais dessus. Puis j’ai vite compris qu’il serait plus intéressant de le faire sur mes propres prods, donc je me suis mis à bosser ça énormément jusqu’à l’intégrer au set.
Nosa : La notion d’intemporel qu’on expliquait tout à l’heure, ça passe aussi par le scratch justement, car c’est une des disciplines du hip-hop. On tenait à la remettre au goût du jour : en gros, on fait quelque chose de nouveau avec de vieux éléments.
P-One : Tu disais que le rap était mieux avant, mais il faut dire un truc très très simple, la musique rap est basée sur le sample, qui est quand même la reprise d’un morceau, donc ça peut être un morceau de classique, un morceau de soul, de métal, de disco, on peut sampler ce que l’on veut, à l’époque que l’on veut ! Par conséquent, cette musique est encore plus intemporelle qu’une autre. Elle se base sur des éléments anciens, sur des éléments nouveaux. Dès que l’on commence à devenir un puriste on s’aperçoit qu’il y a des évolutions constantes.
DavyCroket : Sur scène, vous m’avez fait penser à un curieux mélange à mi-chemin entre Hocus Pocus, Orelsan et Chill Bump. Justement, je voulais savoir quelles étaient vos influences ?
Nosa : C’est marrant que tu parles d’Hocus Pocus car je les ai vu il y a trois ans ici, et c’était franchement l’un des meilleurs concerts que j’ai pu voir. Ce groupe m’a vraiment influencé, en particulier 20Syl dont je me sens très proche artistiquement parlant. Sinon sur l’écriture, je m’inspire du rap français en général, mais je vais puiser un peu partout, en particulier chez les cainris qui ont un flow et une langue beaucoup plus chantante qu’en France. A mon sens, ils ont quelque chose de plus à apporter.
P-One : Sauf que nous on a quelque chose en plus et c’est le vocabulaire haha !
Nosa : Au final, on veut allier les deux ; les américains ont une approche totalement différente avec la musique, et c’est ce qu’on veut leur emprunter en conciliant ça avec la richesse de la langue française
P-one : On a remarqué qu’aux states il y avait des producteurs comme Kev Brown, Dj Premier qui te composent des instrus où tu peux pas te permettre de dire « vas-y, je vais te kicker un 16 ». Sur ces instrus, il faut qu’il y ait un certain message qui passe, et honnêtement, sur les prods, je suis influencé par ce qui se passe de l’autre côté de l’Atlantique, ne serait-ce que pour les rythmiques. Je suis batteur d’origine et les batteries électroniques, ça a le don de m’insupporter. Ce que je veux, c’est avoir un vieux grain, avec une vieille basse, etc.
Davycroket : C’est vrai que maintenant il y a de moins en moins de grains sur l’écoute des instruments, tout est fait via pc et ça bride l’authenticité.
P-one : Cependant, une basse crade peut te faire ressentir beaucoup plus de choses. Justement, c’est ce que l’on aime, quand la guitare cogne, t’es là tu te dis « Wahou , y’a vraiment une émotion là-dedans ».
C’est ça la musique, c’est de l’art, dans lequel le but est de transmettre une émotion.
Nosa : C’est ça la musique à nos yeux ; un art qui transmet une émotion.
P-one : Pour l’anecdote, un jour on m’a dit « arrête de faire de la batterie, fais de la musique » ; il m’a ouvert les yeux et je me suis dit « Ok d’accord, j’ai rien compris du tout ». C’est un art tout simplement. Faut que le message passe, et pour que le message passe, il faut des émotions.
DavyCroket : En ce moment est-ce que vous avez un coup de cœur pour un morceau particulier ou un projet ?
P-one : Eh bien, on va d’abord donner notre coup de cœur commun : Boog Brown et Apollo Brown. Une fine fleur des Etats-Unis avec une nana qui pose, OUI OUI c’est une NANA QUI POSE ! Et niveau flow, elle met à terre un paquet de monde, les prods sont dingues. Pour ceux qui iront écouter, il y a une version remix qui est sortie avec plusieurs producteurs différents et c’est tout aussi puissant.
Nosa : Il faut savoir que tous les Brown assurent haha : Boog Brown, Appollo Brown, Kev Brown, ils sont tous très chauds ! De mon côté, Némir est ma grosse découverte, j’adore sa manière de saccader son texte, c’est vraiment très agréable à écouter. Sinon, je suis sur Espiiem, 5 Majeur et côté cainris, R.A. The Rugged Man, Brother Ali…
P-one : Pour citer un classique : Dj Premier et Bumpy Knuckles avec « KoleXXXion ». De l’intro à l’outro on a envie de décoller de son siège.
DavyCroket : Pour finir : Un petit mot sur le festival ?
P-one : Sincèrement, pour une première, excellent ! Rien que le cadre, le lieu, cet espèce d’amphithéâtre naturel, magnifique ! L’organisation nous a montré un petit chemin pour accéder à la scène et on était totalement ailleurs ! Vraiment joli.
Nosa : Gros concept, première édition, c’est réussi ! Pour la petite anecdote, j’étais tellement détendu au milieu de la verdure que j’ai pas ressenti le moindre stress avant de monter sur scène ! Un grand merci à Axel Nadeau et le reste du staff, merci à toi DavyCroket !
Merci à vous les gars et on espère vous voir très prochainement !
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