Autrefois moches dans la tess, aujourd’hui ils plaisent à Eva Mendes. Chronique sur l’ascension fulgurante d’un duo à la musique et aux cheveux soyeux.
PNL, c’est ce groupe sponsorisé par Babyliss dont vous avez forcément entendu parler si vous ne vivez pas dans les tréfonds d’une grotte vosgienne. En mars 2015, les deux frères qui composent ce duo originaire de Corbeil-Essones – plus exactement de la cité des Tarterêts – sortaient Que La Famille. Puis, le 30 octobre de cette même année, nous avions droit à Le Monde Chico. Avec ces deux albums, le groupe avait apporté une fraîcheur sans égale au paysage du rap français et, là où le calendrier chinois disait de l’année 2015 qu’elle était l’année de la chèvre et du mouton, nous préférons dire qu’elle a été l’année QLF. Des tours aux appartements les plus hupés de la capitale, les « kheys kheys kheys » et les « rom pom pom pom » résonnaient et le fossé qui séparaient les dealeurs de leurs clients n’avait jamais paru aussi mince.
« Mais comment est-ce possible ? Quelle est leur recette ? » se questionne encore Adrien, jeune rappeur originaire de Besançon qui peine à atteindre les 500 vues sur son dernier clip intitulé « Cheveux lisses, j’vends du shit en bas du bâtiment ». La question est plus que pertinente :
- Ce qui fait vraisemblablement le succès de PNL, ce sont les productions sur lesquelles les deux frères du 91 viennent poser leurs voix. Mélodieuses, tantôt mélancoliques, tantôt apaisantes et invitant au voyage, celles-ci ont dès le départ permis au duo de se démarquer de ce qui se faisait en France. La radio Mouv’ a ainsi appelé leur genre musical le « street-cloud », en référence au cloud rap (Yung Lean, Bones…) où l’on retrouve des beats du même genre et à la présence omniprésente du thème de la rue dans les sons du groupe.Ce qui fait également leur force pour certains, c’est leur faiblesse pour d’autres, à savoir : les paroles. Simples, efficaces, riches en références et en images, les frères de l’Essonne dépeignent la triste réalité de la vie de cité de façon épurée, parlent de leur spleen, de leur haine et de leurs espérances avec le vocabulaire de la rue.
- Le flow des deux rappeurs présente lui aussi un attrait particulier puisque bien souvent chantonnant (mais également incisif par moment, c’est bien d’être romantique mais faut y aller fort par moment aussi hein.) De ce fait, un contraste se crée entre la dureté des paroles et la manière de les déclamer, contraste plus qu’appréciable. Pareillement, les gimmicks qu’emploient le duo tout au long de leurs musiques viennent participer à l’atmosphère de chacune d’elles.
- On peut difficilement parler de PNL sans parler de leur authenticité. Bien loin des clashs, des interviews et de tout ce qui, au final, se rapporte au « game », les frères du 91 font leur musique, rien de plus. A ça près, qu’il gère leur communication d’une main de maître sur les réseaux sociaux : teasing, atworks, proximité avec leur public… A noter qu’ils sont également très difficiles à voir sur scène, en témoigne leur annulation à la dernière minute du concert qu’ils devaient donner au Printemps de Bourge.
- On vous parle d’un duo mais la musique du groupe n’aurait sûrement pas le même impact sans les réalisations vidéos qui lui vont du pair et qui sont signées Mess. Ce sont de véritables court-métrages qui accompagnent ainsi de nombreux morceaux de PNL. L’exemple le plus judicieux est le clip de « La vie est belle », tourné en Namibie et tout simplement magnifique. On aurait également pu choisir celui qui accompagne « Naha », sorti la veille de la mise en vente de l’album « Dans la Légende ».
Il y’a plus d’une semaine, sortait donc le troisième album du duo, album intitulé «Dans la Légende» et dors et déjà disque d’or, cette prouesse de ventes venant, sans le vouloir, donner tout son sens au nom du projet. On y retrouve ce qui a fait le succès de Tarik et Nabil par le passé : des productions aériennes et des paroles crues et belles à la fois, délivrées tantôt avec un flow tantôt chantonnant, tantôt plus incisif mais toujours un peu nonchalant.
Mais, là où des artistes auraient pu se contenter de reprendre à la lettre la recette qui avait marché par le passé, Ademo et N.O.S viennent au contraire reprendre cette recette en utilisant des ingrédients, d’une part de qualité supérieure (maîtrise encore un cran au-dessus du vocodeur, flow parfaitement calé et venant sublimer chaque instrumentale, paroles plus travaillées…) et d’autre part, parfois différents. Pour illustrer ces propos, on pense notamment à un morceau comme « Bené » où le duo s’essaye pour la première fois et avec brio au zouk.
Mais où vont-ils s’arrêter… ? Disque d’or en une semaine, records de streaming les faisant passer devant Drake et Rihanna, en couverture de The Fader, plus de 300 millions de vues sur leur chaîne YouTube… Le duo du 91 a le vent en poupe et semble ne pas vouloir s’arrêter en si bon chemin. Le monde ou rien chico.
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