Si Ulysse était passé par cette île-là, il en aurait eu rien à foutre de rentrer à Ithaque.
Dimanche 24 août, la 4ème édition des Îlots Electroniques se tiendra au parc de la Gloriette (37). A l’occasion de cet événement, le trappeur du son vient frotter sa queue de raton-laveur dans ce concert-diurne-dominical-techno-hype et en profite pour éclairer son cyber-lecteur sur ce phénomène tourangeau (du fier nom de celui qui réside à Tours).
On ne compte plus les articles, ni les pages de littérature, ni les dires des Moldus (les non-tourangeaux, donc) qui définissent la ville de Tours sous l’allégorie de la belle endormie, de la langoureuse, de la charmante indolente au chignon impeccablement suspendu en l’air. Depuis quelques mois, l’association des Îlots électroniques se charge de botter le cul à cette feignasse et, ô ciel, de brusquer son habituelle quiétude dominicale en balançant des kilowatts de Musiques Techno. Ne lui en déplaise si les subwoofers ébouriffent sa traditionnelle coiffure.
Le concept existe depuis que l’House et la Techno sont revenues à l’honneur pour enterrer leur cousine hâbleuse que l’on se risquera de qualifier, parmi la tripoté de terminologies liées au genre, d’électro-dancefloor. Des nantais, bordelais et parisiens amateurs de cette musique, qui ont compris qu’ils n’étaient pas les seuls à s’ennuyer comme des croutons de pain derrière une malle les dimanches, ont décidé d’aménager les plus beaux coins de leurs hometown pour rythmer à 130 bpm le dernier jour de la semaine.
Enzo Petillaut, le président de l’asso, que nous avons rencontré, avoue s’être inspiré des Goûters Electroniques nantais. « J’avais envie de promouvoir cette musique de manière démocratique. Le fait que je travaille depuis quatre ans pour le festival Aucard de Tours (NDLR : festival pionnier des festivals de musiques actuelles à Tours, naît il y a 29 ans) m’a permis de rencontrer pas mal de personnes. Inutile de préciser que pour le lieu de la Gloriette, je connaissais déjà bien l’équipe (utile pour toi Moldu, la Gloriette, c’est le site du festival Aucard) ! Pour le projet 244 qui a accueilli les deux premières éditions en intérieur, on a tous eu un coup de cœur pour ce lieu qu’on a découvert tardivement, à l’occasion de la release party de l’album des Bad Billy en janvier dernier ».
Humble, l’animateur de Radio Béton (radio underground made in 37) pense, au départ, pouvoir réunir 300 à 400 personnes. C’était sans compter la nouvelle génération de turons assoiffés de rythmes binaires, de musiques répétitives et de basses à s’en décoller les émistouffles qui étaient 1500 lors de la dernière réception donnée dans l’ancien jardin de Louis XI, au château du Plessis. Le Roi en aurait mangé sa poudrière tant il n’est jamais parvenu à réunir lui-même un si grand monde lors d’une de ses fameuses gardens.
Ce succès, si on le doit à la vista du chargé de com Thomas Giovanni et au pif et au carnet d’adresse d’Enzo qui a senti le coup et qui connait bien le milieu associatif tourangeau ; on le doit aussi à Arno N’Joy, délégué à la programmation et à la coordination technique, DJ Résident, animateur d’une émission techno et house sur Béton depuis 20 ans et cracheur de feu. Le « papa » comme on l’appelle ici, pour son âge pourtant encore jeune (39 ans) mais surtout pour son influence, son expérience, sa connaissance du milieu de la fête tourangelle « J’ai commencé à mixer à Tours en 91 (NDLR : en 1991, pas 1891, quand-même…), j’ai joué à peu près dans tous les lieux possibles». Moins paillette que Jean Roch, Arnaud est plutôt un amoureux de sa ville qu’il connaît par cœur et un inconditionnel de la musique techno depuis que celle-ci émet ses premiers balbutiements sur les ondes.
Il guide les jeunes DJs tourangeaux et participe à dénicher les djs qui vont jouer aux Îlots. Cette culture il la forge depuis ses 15 ans : « Mes premières influences viennent de la radio : MaXXimum qui m’a beaucoup marqué, l’émission Megamix de Dimitri from Paris sur NRJ. J’ai aussi été très influencé par Laurent Garnier, également à travers ses différentes émissions de radio… J’adore mixer, je ne me lasse jamais d’écouter les nouvelles sorties aussi bien House que Techno, j’y passe énormément de temps et je prends toujours autant mon pied à tomber sur des pures sorties que je partage ensuite aux Îlots et dans mon émission sur Béton ».Et lorsqu’on lui demande quel impact a eu les Îlots sur la techno tourangelle, le Godfather rétorque avec enjouement :
« Ce qui se passe depuis quelques mois est juste magique ! Réunir 1500 personnes sur une musique pointue et à Tours, j’en rêvais depuis 20 ans. Ce qui est vraiment bien dans cette histoire, c’est que les plus jeunes sont revenus à la bonne vieille techno, aux fondamentaux quoi ! Ils sont relativement bien cultivés et respectueux des plus anciens, curieux. Bref une belle unité inter-générationnelle. C’était aussi une des principales motivations des Îlots. Réunir les familles, les plus jeunes, tout monde, et surtout montrer qu’on peut écouter cette musique tous ensemble sans être complètement barrés. ».
Et si Edouard Balladur serait dubitatif face à cette dernière sentence, lui pour qui techno, dégénérescence de la race aryenne et drogues dures sont synonymes, il s’intriguerait néanmoins pour cette énigme non résolue : « M’enfin, pourquoi le sobriquet d’Îlots ? » et le trappeur, bien informé, lui répondrait : « Parce que, Edou, à la base, le kiff ultime de l’asso, ce serait de jouer sur l’île Simon, cette belle motte de terre posée sur la Loire comme l’intimité de Poséidon. Le cadre est magnifique alors, fais comme d’hab, abuse de ton pouvoir et de tes connexions, souffle-en un mot à tes potes politicards, et permet nous ce bonheur ! ».
Vive les Îlots, que Jah et Edou nous permettent de voir la 5ème éditions sur sa Promise Land et que notre petite bourgeoise continue à se dévergonder le dimanche. Elle est tellement plus sexy comme ça…
Au programme ce dimanche :
Dès 14h : Le collectif Flower Power, acteur majeure de la scène tourangelle depuis près de 15 ans, ils sont 5 et se complètent très bien, allant de la House, Tek house jusqu’à la pure Techno.
Puis : Arno Gonzales , DJ emblématique de la scène angevine et meneur des événements Domingo à Angers (le même genre de mecs que ceux des Îlots qui pourrissent les après-midi chansons et variété des grand-mères alentours) fin producteur dont certaines prochaines sorties devraient bien faire parler d’elle. Il se situe entre House et Techno, toujours subtile et raffiné.
Et enfin : Théo Muller, il est membre du collectif Midi Deux qui organise depuis quelques années des gros plateaux Techno à Rennes. Il joue la veille pour les parisiens de 75021 et son style mélange House et Techno, toujours très efficace !
Facebook // Vimeo // Arno N’Joy
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