Même s’il est possible de reprocher à des rédacteurs de ne suivre que les mails promos qu’on veut bien leur envoyer, il reste des rencontres que ces mails n’arrivent pas à faire changer. Un label, un artiste ou un morceau qui font qu’on se plonge littéralement dans l’écoute sans en sortir avant la fin. Certaines fois, une seule fin ne suffit pas et l’inventeur de la fonction repeat devient notre divinité. Cette rencontre d’un nouveau type, c’est à peu de choses près ce qu’on a vécu avec la dernière release du catalogue Bon Temps Records.
Et d’ailleurs, l’histoire de ce Spectrum commence par une rencontre. Celle de Frau Silberfischer et de Verlatour qui comprend très vite les promesses que la musique de Elke, de son vrai nom, fait dès que l’on se plonge dans son univers musical. On la verra ainsi signer une carte postale musicale sur une compile du label. Premier son et première impression avec ce côté organique qu’elle donne à une musique pourtant numérique. L’atmosphère est froide comme un robot, mais il y a un peu d’humain dedans.
Cette première apparition sur Bon Temps n’était pas un coup d’essai. Avec Sad Postcard, Elke posait les bases d’un son dont la noirceur ferait baver n’importe quelle sataniste éleveur de Shiba. Au delà de cette froideur se cache un petit je-ne-sais-quoi d’humain. Un univers musical désormais maîtrisé et aiguisé après deux ans de travail sur ce Spectrum dont les seuls couleurs sont sur la pochette signée de l’artiste elle-même.
Avant même l’écoute, il est en effet nécessaire de se préparer à affronter un noir des plus profonds sans pour autant en avoir peur. L’album incarne la nyctophilie à l’état pur. Le noir nous va sans pour autant qu’on ne deviennent de gros goths sacrifiant des allumettes dans une sombre optique. Non, au delà de toute noirceur Frau Silberfischer nous emmène dans un paysage musical envoutant et mystique où synthés et basses viennent s’entrechoquer entre atmosphérisme et lourdeur. Bien qu’il fasse noir et que ce ne soit que musical, l’album ouvre nos yeux à l’imagination.
La première écoute ne fait que gratter la surface de cette musique sombre. La seconde écoute permet de comprendre tout le travail et les petits détails qui se cachent au fond de la musique. Si dans Sad Postcard des éléments venaient déjà de la vie de la productrice allemande, dans le morceau Spectrum, la voix vient, elle du Spectrum Museum de Berlin.
Drück halt, dann fährt es in german
Un musée qui donne son nom à un morceau puis à l’album comme une preuve de l’humanité de la musique. On arrive enfin à entrevoir l’analogique dans le numérique et Spectrum prend une toute autre forme. Une évolution d’ailleurs poussée encore plus loin dans les 3 remixes qui accompagnent cette release. Verlatour et Swarm Intelligence donnent de nouvelles atmosphères à ce morceau en le passant dans une phase plus dansante avant de l’envoyer dans le contraire du plus blanc que blanc. René Schier, quant à lui, s’attaque à Gravitate et lui donne un côté nonchalant sans pour autant en faire l’hymne de Rantanplan.
Au final, il fait nuit et on est aveugle, mais putain, qu’est ce que c’est beau. Plus aucune raison d’avoir peur du noir, des ténèbres ou de toutes ces choses qui effraient les plus petits. Frau Silberfischer coupe les veilleurs, ferment nos yeux et nous borde avant de nous envoyer ailleurs. Ce n’est qu’un début et on ne peut que adhérer. Vivement la suite. D’ici là Spectrum se ranger très normalement à côté de Lorn, Emika ou Burial.
Bonne nuit
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