À l’occasion de leur passage à Bordeaux, on s’est posé autour d’un verre avec les frères Burden originaires de Détroit connus sous le nom de Octave One.

OCTAVE ONE, pourrait être à la techno ce que David Bowie est au rock grâce au titre « Blackwater », un grand classique, tout comme « Jaguar » de Rolando. Les frères Burden se sont prêtés au jeu du question/reponses auprès de notre équipe avant leur live au BLOCK (BT59) à Bordeaux. ça parle, boutons, disques, techno et années 90. 


 

Salut les gars, bienvenus à Bordeaux. Comment ça va aujourd’hui ?

Bien ! Merci de nous accueillir. On est fatigué, mais ça va bien.

J’imagine que vous êtes fatigués ! Vous jouez ce soir au Block, vous jouez également demain (samedi) et dimanche à Detroit… Donc en fait vous êtes fatigués en permanence ?

Oh oui mec, c’est une vie très remplie.

Pas trop dur de garder le rythme ?

Ça va. On a des breaks de temps en temps. Là, on est super occupé mais dans deux semaines on a un break. Une pause idéale pour recharger les batteries !

Quand vous faites une pause vous retournez voir votre famille aux USA, vous partez en vacances ?

On rentre aux USA, à la maison.

Pourquoi avoir quitté la ville de Détroit ?

Effectivement, nous vivons à Atlanta. On a bougé de Detroit il y a environ 9 ans pour venir s’installer à Atlanta pour la météo et aussi parce que la ville est vraiment belle.

Est-ce que changer de ville a changé votre manière de faire de la musique ?

On est sur la route tout le temps en fait… On est à la maison 30% du temps, à peine ! On fait ça depuis longtemps donc ça n’impacte pas vraiment notre musique.

Vu que vous êtes frères, est-ce qu’on peut penser que c’est important pour vous de faire de la musique en famille ?

C’est comme ça qu’on a commencé. Comme un groupe. On est 5 frères. Et Lenny et moi on est les experts du « live ». Les autres préfèrent rester à la maison. Cette vie est très difficile, les avions, les shows…

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Vous avez commencé à faire de la musique à quel moment ? Quand vous étiez jeunes ?

Et bien, ça  dépend de ce que tu appelles être jeune ! (rires) Ouais, c’était il y a environ 15 ans. On devait être en 1994.

Comment avez vous commencez la musique ?

On a pris des cours de musique quand on était petits. C’est notre mère qui nous a mis la dedans. On a suivi des cours de piano. Un peu plus tard, on a commencé à acheter des disques. On voulait faire notre musique. On achetait la musique de Chicago et de Detroit. Une 909 c’était encore rare à l’époque.

Quel était le premier disque que vous ayez acheté ? 

Je peux voir la pochette dans ma tête mais je ne me souviens plus du disque. Mais chaque weekend, on allait acheter des disques. Ça a commencé en 1983 je crois, ou 84.

« On connaît toutes nos machines, ce qu’elles font et comment elles réagissent même si elles nous donne souvent du fil à retordre. »

Maintenant que vous faites surtout du live, est-ce que vous allez encore acheter des disques ?

Pas vraiment, on se concentre vraiment sur nos performances live et franchement on achète surtout des machines ! (rires)

C’était laquelle votre première d’ailleurs ?

On a acheté deux machines en même temps. Une Kawai R50 (à gauche) et un Korg DD1 (à droite).

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Et même sans aller chez les disquaires, est-ce que vous écoutez toujours beaucoup de musique ? Et de styles différents ?

Oui ! On écoute de tout ! Vous seriez surpris ! On n’écoute pas juste de la musique club.

Lorsque vous montez sur scène pour un live. Combien de temps il vous faut pour tout installer ? Vous l’installez vous même ?

Quand on est en festival, on a quelqu’un qui le fait pour nous.  Par exemple, ce soir on est à Bordeaux et demain, à Amsterdam dans un festival. On arrive à 16h et on joue à 18h ! 2 heures pour tout mettre en place, c’est trop court ! Et je ne sais pas si vous avez vu la tonne d’équipement qu’on a !

Et justement, avec toutes ces machines, vous avez déjà eu des problèmes en live ?

Tout le temps ! (rires) C’est ce qui fait la magie du live, d’ailleurs !

Pourquoi avoir fait le choix de travailler uniquement sur des machines et non des logiciels ? 

En fait on a commencé avec ça. On a essayé quelque fois mais on passait notre temps à regarder l’ordi…ça n’allait pas. Là, on a nos machines. On les connaît toutes et on sait ce qu’elles font et comment elles réagissent.« »

Et si vous ne pouviez en garder qu’une, vous prendriez laquelle ?

Sans réfléchir, la 909 (réponse unanime). Avec le temps, on a eu et vendu beaucoup de machines, quand l’argent se faisait rare. Mais elle, on a jamais pu s’en séparer.

On vous range souvent dans la catégorie des artistes techno, mais à côté des productions de Octave One, vous avez aussi produit de la house sous le nom de « Random Noise », vous pouvez nous en dire un peu plus à ce sujet ?

Oh ! Random Noise c’était aussi de la techno ! La différence c’est qu’avec Random Noise on bossait sur des samples en plus des machines. Ça donnait un côté plus organique à la musique.

C’était juste différent dans la manière de faire ?

Oui exactement. On s’inspirait vraiment de la musique des autres. La track Falling in Love par exemple. On samplait des vocaux, des chords, et on faisait des disques.

Et à quel moment êtes vous devenus des DJ internationaux ?

Dès notre premier disque ! Il est sorti sur Virgin Records, c’était une compile techno.

« Quand on a commencé, en 1994, on faisait de la musique pour le plaisir d’en faire. »

Quand vous y repensez, est-ce que vous croyez que le fait de venir d’une ville comme Détroit vous a aidé pour être plus exposé ?

Tous nos potes étaient producteurs. On faisait tous ça et on se connaissait tous. Si on avait pas été a Detroit on n’aurait peut être pas connu ça. La communauté était la et nous a aidé !

Aujourd’hui, la ville a bien changé… Ce n’est plus l’épicentre d’une culture musicale…

Oui, aujourd’hui tout est très différent. À l’époque, on faisait juste de la musique pour le plaisir d’en faire. Et si un DJ voulait jouer notre musique c’était un bonus vraiment cool. Maintenant, c’est plus difficile parce que tout est mondialisé donc on est directement confronté à l’intégralité du monde ! Notre monde à nous était tout petit.

Vous pensez que les évolutions du monde ont eu un impact sur la musique et la façon d’en faire ?

Totalement ! Il y a eu une progression dans la manière de produire. Aujourd’hui, les choses sont plus « claires », plus fortes. Pour vous donner une idée, on ne savait pas ce qu’était un compresseur quand on a sorti notre premier disque. On faisait juste de la musique. Maintenant de très bons ingénieurs font sonner les morceaux les plus basiques en quelque chose de vraiment costaud !

« Ce qui est génial avec la techno de Detroit, c’est qu’elle ne rentre dans aucune case. »

Et, comment vous expliquez qu’aujourd’hui beaucoup de jeunes producteurs essayent de reproduire les sonorités à l’ancienne, moins clean ?

On peut utiliser nos machines pour faire un énorme kick, de super clap et, avec tout ça, on fait un son. Le mix ne viendra qu’après. Aujourd’hui, le mix fait parti intégrante de la création. C’est la différence. Maintenant, les sons sont directement fait pour d’énormes sonos comme celles des festivals. Quand on se demande si on fait de la bonne musique, il faut juste se demander si, dans 10 ou 15 ans, cette musique sera toujours bonne ou non. À l’époque, un bon morceau techno c’était celui qu’on pouvait écouter en club, dans sa voiture ou même avec sa meuf… Est ce que vous pensez qu’avec ce qui sort aujourd’hui, on peut toujours faire ça ?  (Boum Boum Boum) (rires)

Votre morceau Blackwater est l’exemple parfait pour illustrer ça ! On peut vraiment l’écouter partout.

Oh oui mais beaucoup d’autres sons aussi ! C’est vraiment très dur de faire ça. Quand on l’a fait, on n’imitait personne et on ne savait même pas ce que les autres faisaient ailleurs ! On l’a fait sans se poser 1 milliard de questions. La seule mission c’était de faire un disque. Point barre. Maintenant, on est exposé de fait à toute la musique avec internet, on ne fait plus vraiment de musique pour les sortir en disque mais plus pour pouvoir les jouer en live.

Est ce que vous avez une méthode de travail précise pour produire vos morceaux ?

Non pas du tout ! On peut partir de n’importe quoi, d’un kick, d’un sample, d’une mélodie qu’on a en tête. Là, par exemple, on est très fatigué, car on a passé la nuit à travailler sur notre album. On peut bosser pendant 3 mois sur certains morceaux. La magie des nouvelles technologies c’est qu’on peut tout mettre sur l’ordi, tout réécouter et aussi tout réajuster si il le faut.

« Pour nous, c’est important d’avoir un panel musique très très large, tout en ayant une forte identité. »

Maintenant que vous jouez partout dans le monde, est ce que vous voyez des différences entre les pays pour ce qui est de la techno ? Est-ce qu’il y a une différence entre jouer de la techno en Europe ou aux États-unis ?

Il y a toujours des différences et des similitudes. Par exemple, le public européen est plus éduqué, d’un point de vue musical, que le public américain. Ici, quand on joue un morceau, tous les gamins la connaissent alors qu’ils n’étaient pas nés quand on l’a fait il y a 20 ans. Si on joue le même morceau aux États-Unis, les gens vont venir nous demander quand est prévue la sortie ! (rires)

Mais malgré cette différence, vous êtes quand même impatients de jouer à Détroit dans 2 jours ?

Oui bien sûr ! On est impatients et excités. C’est toujours fun de retourner à la maison. On a tous nos amis la bas, c’est toujours bon. On veut retourner chaque endroit où on passe, mais jouer à la maison c’est toujours particulier.

Et est-ce qu’il y a une différence pour vous entre jouer à des endroits comme Bordeaux ou jouer à Detroit ?

Chaque endroit est différent, il faut trouver la bonne vibe pour avoir des réactions ! C’est le coté marrant. On ne joue jamais la même chose, ça de la house à la techno, on a un catalogue très large donc on peut s’adapter. On peut jouer du DJ Sneak ou du Disclosure. C’est ce qui est génial avec la techno de Detroit : elle ne rentre dans aucune case ! Et, pour nous, c’est important d’avoir un panel musique très très large, tout en ayant une forte identité.

Merci beaucoup les gars, un petit mot pour finir ?

On bosse sur notre nouvel album, on essaye d’être différents, comme d’habitude. Rendez-vous très vite !

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A propos de l'auteur

Chef de bord

Chef de meute. Tu me trouveras quelque part entre Bordeaux, Poitiers et La Rochelle, soit dans un festival ou dans une salle de concert.

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